Position paper on enlargement as deepening of the European Union (in French) – “Deepening” vs. “Enlargement”: A False Dilemma
November 8, 2019
Katerina Kolozova
« Approfondissement » versus « élargissement » : un faux dilemme
Nous pourrions interroger deux points : d’une part ce que pourrait apporter la Macédoine du Nord à l’Union et à la France et d’autre part ce que l’élargissement lui-même peut leur apporter à l’époque où la France considère son « approfondissement » comme une priorité.
D’entrée, nous considérons la dichotomie « approfondissement » versus « élargissement » comme un faux dilemme : un « approfondissement » qui rendrait le continent Européen et ses pays les plus puissants (comme la France et l’Allemagne) plus forts géo-politiquement et plus indépendants aussi bien économiquement que militairement par rapport aux autres grandes forces globales a nécessairement besoin d’un continent intégré au sens territorial (notamment par rapport au contrôle de ses frontières) mais aussi économiquement.
L’intégration des territoires qui sont entourés de pays membres de l’Union aboutira à stabiliser le continent. Nous pouvons admettre la thèse selon laquelle une intégration territoriale entraine la stabilité entendue comme sécurité géopolitique, mais force est de constater qu’actuellement l’Union Européenne est poreuse et que cette porosité rend les pays membres sujets à toutes sortes de déstabilisations possibles.
Le fait même que pendant la prétendue période de « crise migratoire », il fut affirmé que le contrôle des frontières dépendait de la participation – et pas seulement de la coopération – de pays qui sont pourtant hors de l’Union, par exemple la Macédoine du Nord ou la Serbie, montre bien une tentative pour traiter de façon ad hoc cette porosité.
L’approfondissement coïncide avec l’élargissement dans le sens économique aussi. Les analyses de l’IMF (2014) et de l’OECD (2015) montrent qu’un développement équilibré entre les régions les plus riches et les régions plus pauvres contribue à la stabilité et au développement de la totalité (dans ce cas-ci : du continent ou de l’Union). Au contraire de l’argument populiste, l’investissement dans le développement économique des pays plus pauvres aboutit à un enrichissement et à une stabilité économique non seulement de la totalité mais aussi des pays riches du continent.
Il convient d’abandonner le discours qui demande qu’un Etat soit au niveau des pays membres pour compléter le processus d’adhésion à l’Union Européenne.
Il faut travailler à leur préparation pratique – et pas seulement formelle – pro-activement parce que c’est la totalité du continent qui en profite et pas seulement les pays pauvres comme les populistes insistent à le dire et le craignent.
Dans le cas de la Macédoine du Nord, il faut rappeler au lecteur que d’après plusieurs rapports sur le progrès du pays, concernant les reformes, le pays est plus avancé non seulement par rapport aux autres pays des Balkans de l’Ouest mais aussi par rapport à certains pays membres de l’Union. La Macédoine du Nord était le deuxième pays de l’ancienne Yougoslavie à être invitée au processus d’adhésion à l’Union, après la Slovénie et avant la Croatie. Le pays était candidat même avant l’existence du « paquet » des Balkans. C’est pour cette raison et en raison de son progrès réformateur que le pays ne peut pas et ne doit pas être traité comme faisant « paquet » avec l’Albanie.
Il faut considérer sa candidature séparément.
Le concept d’un paquet est lui-même insultant et sans doute aussi un peu raciste – « les Balkans, vous êtes tous les mêmes pour nous » (« you all look the same to me »).
Il ne faut pas oublier que dans le contexte d’un surgissement brutal de gouvernements autoritaires et populistes en Europe, la Macédoine du Nord est la première sur le continent – oui, bien avant la Slovaquie – à avoir réussi le changement d’un régime pourtant crée suivant la recette de Viktor Orban. Le nouveau gouvernement travaille sur des reformes qui visent spécialement à démembrer un système de gouvernance que l’on a nommé à Bruxelles « une capture de l’état ». Dans le contexte Européen où le populisme du style « illibéral », symbolisé et incarné par Orban, et les Kaczynskis et Salvini, est à la hausse, la Macédoine du Nord a inventé le modèle du renversement d’un tel gouvernement dont l’ancien premier ministre se trouve maintenant littéralement exilé – en dépit du sens symbolique aussi – en Hongrie où il était accueilli par Viktor Orban personnellement.
Le modèle macédonien de révolte contre « les illibéraux » et aussi le modèle de réforme pourrait être une contribution importante pour une Europe « approfondie ».
Le pays a fait le sacrifice de changer son nom constitutionnel pour améliorer et stabiliser ses relations avec la Grèce et en faisant un tel geste il a contribué pour la stabilité de la région et de l’Europe. Pour avoir amélioré ses relations avec la Bulgarie et, par conséquence, résolu des problèmes de l’espèce identitaire concernant les histoires nationales des deux pays, la Macédoine du Nord a contribué à la stabilisation quasiment permanente de cette région et du continent Européen en entier.
« Approfondissement » versus « élargissement » un faux dilemme